Le vendredi 13
Voilà une superstition entièrement liée au christianisme. Parlons d’abord du vendredi. Pour les Chrétiens, ce jour est celui de la mort du Christ, et par extension, au Moyen Age, on lui attribue toutes les catastrophes bibliques. On raconte que c’est un vendredi qu’Adam fut chassé du paradis, que Caïn tua son frère Abel, que survint le déluge, que Pierre fut crucifié, Paul décapité, Etienne lapidé… et la liste est encore longue. Le vendredi, jour de repentance, on mange maigre (sans viande) et l’on évite de festoyer et de chanter. Il se peut que l’on doive à cette interdiction de réjouissances le vieux dicton, encore connu aujourd’hui : « Qui rit le vendredi, pleurera le dimanche ! » Avec un tel palmarès, on peut comprendre que le vendredi se présente comme le jour néfaste par excellence.
De façon générale, il ne faut rien entreprendre un vendredi, que ce soit un voyage, une tâche ménagère, comme la lessive ou la fabrication du pain, ou un travail agricole. On ne doit pas se couper les ongles, changer de chemise ou encore se marier.
Le 13 n’est pas mieux loti, puisqu’il rappelle la Cène et ses treize participants (les douze apôtres et le Christ). Cette tablée funeste, à laquelle participe Judas, qui endosse le rôle du traître, est directement liée à la superstition, générale et tenace, qui consiste à craindre la réunion de treize personnes. Le 13, qui encore aujourd’hui continue d’alimenter des craintes, ne va pas en rester à la réunion d’individus et va s’étendre à tout un ensemble de choses. Toutefois, cette extension semble surtout constatée dans les villes, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle.
Et voilà que la peur du 13 va venir s’ajouter aux tabous du Vendredi, vraisemblablement dans la seconde partie du XIXesiècle.
Au XXe siècle, les loteries en tous genres s’emparent peu à peu de ce jour pas comme les autres et sa singularité retourne la superstition pour en faire un jour de chance.
Désormais, la crainte du vendredi 13 bénéficie d’un nom : la paraskevidékatriaphobie, du grec paraskevi (vendredi), decatreis (treize) et phobos (peur). [Extrait de mon Dictionnaire de la France mystérieuse]